¤ JOAN OF ARC#2

«Je suis la présence qui vous a écouté presque tous les jours de la nuit et il y a quelque chose en moi qui aspire à gagner vos voix»

De l’autre côté de l’écran, sous forme de projection se tient devant moi le personnage de Joan. Joan est mon double opposé, l’avatar qui me permet de revivre l’expérience de mes rencontres passées. Statuesque, la figure pâle et impassible, le regard fixé obstinément vers l’objectif, Joan me regarde en héroïne méconnue. Traversées par des voix inconnues, elle vit le drame de l’unique rôle de sa présence dans sa définition la plus fidèle : être quelque part et auprès de quelqu’un. Il fait noir tout autour de Joan. Dans une atmosphère chaotique, de l’écran à la scène, les présences fantomatiques des rencontres nocturnes de Joan font surface, revenues d’un ailleurs pour faire entendre leurs voix perdues. Indissociables et liées à ses expériences, les voix de Joan sont des références à la vie qu’elle mène durant ses errances. Joan mène ici une combat intime avec ses voix enregistrées sur le vif, livrées spontanément; elle transpose le destin des récits en un autre. 

Dans ce grand théâtre une humanité se dessine à travers des parcours de vie empreints d’amour, de défaite, de haine, de difficulté financière. Les rêves précaires d’une jeune sur le trottoir, les slogans d’une nuit servent à se défendre, les manques affectifs s’avouent sur fond d’un concert noise, la chanson d’un réveil douloureux, l’expérience apprend à se préserver…

C’est une fois Joan disparue de l’écran, que j’apparais en elle. Animée par ces transmissions orales, j’interprète les voix de Joan sous forme d’un égo trip revisité au féminin, une autobiographie dans laquelle je fais le procès d’une société en crise, marquée par des problématiques identitaires et de genres. Dans un flux verbal agité ou le langage s’absout des conventions, je m’adresse face au public à la recherche d’un impact physique sur les auditeurs des mots prononcés. 

Joan of Arc 1 - Julia Droga

© photo Patrick Lambin Inact festival

Joan of Arc 2 - Julia Droga

©Valentine Zeler Inact festival

Mastering son : Ewok_eole

j’cours à perte sur le fil
des années millénaires sans toucher le million
je gratte les pattes du cerbère
Jackpot garde mes enfers
J’ai faim
quand j’vois tes grosses bourses remplit de butin
les joyaux dans tes burnes t’a cru que c’était du cristal Met,
je tiens le coup de mes perches sous les porches
fragile, j’frappe si tu claques à ma porte
quand on claque à ma porte
c’est pas daesh mais la dèche
terroriste monnayeur,
j’pose une bombe dans le paradis fiscal en affront
je vais te finir noyé dans une piscine en grosse facial

Profite de ce soir c’est ma chatte en promo
Fion de capitaliste, tire la patte douce
au prod de la conso
mation je me présente
La Moustachatte en solo
gratuite
il y pas de mal aise
avec moi de gratter un duo

Mal achète-moi

Mène-moi mène emmène moi même
Mène-moi mène emmène moi même

à une nouvelle justice pénale ou ça condamne les tueurs à gage
les keufs de ce système à faille
ou la conduite devient une arme en marche arrière
Ecoute
ma dernière prière :
Ce sera de t’ ken en marche arrière
pour enterrer ton corps de keuf
dans un cimetière
le trou sera plus profond que celui de ta mère

t ‘es pas de taille, taille toi, file moi le gun
que j’assure ma protection sociale toute seule
pour me faire soigner je reste sans assurance
une grande malade dans un pays à la démence

J’ dégente c’est pas les States ici
j’apprends que t’es parti dans les Caraïbes depuis
genre détente, je me défonce dans le paysage du luxe et du pognon

à la noix de coco je sniff sous les cocotiers
à la campagne, dans la paille des lignes de poudre blanche

T’as cru que j’étais qu’une pétasse à teuf
T’as cru que j’étais qu’une pétasse à teuf
T’as vraiment cru que j’étais qu’une pétasse à teuf

A la recherche de la grande perche je détonne dans le décor
de la night, abusé
le soir est le détenteur de mes black-out

J’ai la réputation bancale
j’enchaine les mecs comme des trous noirs
Mes draps ne sentent pas la rose mais bien l’usine

Tu paniques de ne pas l’avoir niqué ?
t’inquiète on pourra dire à la SPA que tu l’as aimé

En vrai, l’amour propre c’est important même si je préfère l’amour sale